Le Grand Palais sur la Place des Quinconces ( Collection particulière de M. Francis Moro)
L'exposition internationale et maritime de 1907
Plan de l'Exposition Maritime de 1907 (cliquez pour agrandir)
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Pavillons des Etats-Unis et de la Belgique sur les quais ( Collection particulière de M. Francis Moro)
Bordeaux n'a pas eu le monopole des grandes expositions internationales au XIXème siècle ; mais elle a sans doute détenu le record du nombre de manifestations, avec pas moins  de 13, toutes montées par la Société Philomathique. Ce faisant, elle a acquis un savoir-faire reconnu, qui n'est pas étranger au choix du Port de la lune pour accueillir l'exposition organisée, en 1907, par la Ligue maritime afin de célébrer le centenaire de la vapeur. Un choix d'autant plus heureux que Bordeaux avait vu naître, en 1818, le premier vapeur français, "La Garonne".
 
S'appuyant sur l'expérience de la Philo, la Ligue mit sur pieds la manifestation la plus importante qu'ait connue la capitale de l'Aquitaine. Grâce à Hervé Guichoux, il est possible de découvrir cet événement dans toute son ampleur. De l'exploration des fonds d'archives à la navigation sur le Web, pendant deux ans son enquête lui a permis de rassembler des milliers de documents. Il a su nous livrer la richesse de cette exposition. Et de la façon la plus vivante qui soit, en promenant le visiteur à travers les palais et allées de ce qui se voulait un hymne au progrès, à l'aventure et à la nature. La marine alors à son apogée, étant porteuse de toutes ces valeurs, aujourd'hui souvent antinomiques.
 
En suivant Hervé Guichoux, on remonte dans le temps en découvrant tour à tour les palais et jardins de l'esplanade des Quinconces, les pavillons étrangers des quais et les navires ou escadres en visite, dans la rade ou au Verdon. Voyage dans le temps mais aussi sur tous les continents. Chaque palais ou pavillon est l'occasion pour l'auteur de nous révéler un monde datant d'à peine un siècle mais qui nous semble parfois à des années lumière : On suit Charcot dans les glaces de l'Arctique avant d'assister au chargement des troncs d'acajou en Afrique occidentale ou de visiter Anvers et tous les ports et vignobles de France.
 
On sourira parfois, par exemple devant cette "réclame" proposant, pour les distributions des prix, de remplacer les livres "peu utiles ou peu intéressants"  (sic) par de la... Marie Brizard. On réfléchira souvent, en voyant comment les Bordelais de la Belle Epoque mettaient en avant le visage industriel de leur ville, avec en tête des entreprises comme Motobloc et les chantiers navals. Le travail de Bénédictin entrepris - et réussi - par Hervé Guichoux contribuera à éclairer l'histoire du XIXème siècle girondin et aquitain. Il sera également un bel encouragement pour tous ceux qui croient en l'avenir de Bordeaux, la capitale mondiale du vin qui fut aussi pendant six mois celle de la marine.
 

Antoine LEBEGUE
Président de la Société Philomathique de Bordeaux
Vue de la rade de Bordeaux ( Collection particulière de M. Francis Moro)
Le Grand Palais vu du côté des quais ( Collection particulière de M. Francis Moro)
UN CENTENAIRE HISTORIQUE
 
   En cette année 2007, la ville de Bordeaux commémore le centenaire d’un évènement exceptionnel, qui au début du 20ème siècle,  place la capitale d’Aquitaine au centre du monde maritime. En effet, d’avril à novembre 1907, Bordeaux a le privilège d’accueillir la première Exposition Maritime Internationale complète organisée au monde, avec en plus, se référant au calendrier, une célébration par la même occasion du centenaire de la navigation à vapeur qui avait vu le jour le 17 août 1807 aux Etats-Unis.
      Exactement un siècle nous sépare donc de cette immense et rare manifestation  qui durant six mois va non seulement animer la ville et la région, mais surtout la porter sur le devant de la scène internationale en la faisant mieux connaître aux plus grandes nations maritimes de la planète.
    C'est en décembre 1905 que la Ligue Maritime Française désireuse de faire connaître au grand public le but patriotique qu'elle poursuivait, décide d'organiser dans le pays une manifestation éclatante et conçoit l'idée d'organiser une Exposition Maritime ouverte a toutes les nations du monde. Cette exposition devait en outre révéler à ses visiteurs l'effort considérable que chaque pays réalise pour développer sa marine commerciale et sa marine de guerre. C'est en février 1906 que Bordeaux est choisi comme siège de cette manifestation, et c'est le 27 Avril 1907 que l'Exposition Maritime Internationale de Bordeaux ouvre ses portes. L’inauguration officielle ayant lieu le jeudi 2 mai 1907.
 
   Le plan général de l'Exposition et l'exécution presque totale des différents palais qui l’abrite, sont dus à l'architecte parisien, auteur du Petit Palais de l'Exposition Universelle de Paris en 1900, M. Tournaire. Chargé précédemment d'édifier une grande partie de l'Exposition de Bordeaux en 1895, le célèbre architecte était déjà connu et son grand talent était fort apprécié. Dans la place relativement exiguë dont il disposait, et ce, malgré l’envergure de la place des Quinconces et des allées qui la bordent, il a édifié une ville entière, luxueuse, variée, d'ensemble fort homogène et artistique
     Au centre de la place des Quinconces, se dresse un Grand Palais. La façade principale, en face du monument des Girondins, se compose d'un immense pignon de 35 mètres de largeur sur 20 mètres de hauteur, percé de trois grandes arcatures recevant, à la hauteur du premier étage, les balustrades d'appui d'une vaste loggia. Ce pignon central est flanqué de deux tours dont la décoration exclusivement marine, leur donne une ressemblance avec les tourelles armées d'un grand vaisseau de guerre. Au bas de ces deux tours, on admire deux beaux groupes symboliques du sculpteur Convers: l'un représente la captation de la Vapeur, l'autre, l'Électricité.
 
    La façade opposée est au bord du fleuve et domine de toute sa majestueuse blancheur et de son amplitude le déroulement des quais et l'étendue du port. Cette façade est d'architecture vénitienne; elle rappelle un peu le palais des Doges à Venise. La sobriété de sa silhouette s'oppose très heureusement à la diversité et à la finesse de ses détails décoratifs. Elle est flanquée de deux immenses tours de 45 mètres de hauteur, du sommet desquelles le public peut admirer le splendide panorama de notre rade et le déroulement prestigieux et vert de toute la plaine du Bordelais. L'intérieur du grand palais n'est pas moins remarquable que l'extérieur. D'abord, en entrant par la porte de la façade principale (côté des Girondins), on a accès dans la grande nef centrale qui mesure 150 mètres de longueur sur 35 mètres de largeur et 19 de hauteur. Partout on remarque, au rez-de-chaussée de cette nef centrale, les sections de marines étrangères,  les expositions de produits se rapportant à la marine, ou bien la représentation fidèle des navires les plus célèbres, construits par les grandes compagnies soit françaises, soit anglaises, soit allemandes ou autres. Au premier étage, on trouve de nombreux stands consacrés à divers sujets tels que l’océanographie, l’expédition Charcot de 1903, les chambres de commerce portuaires, les ports de pêche, l’enseignement, un salon du tourisme, les sports nautiques, une galerie des Beaux-arts, le Muséo Naval (Espagne), etc.
 
    En face de ce Grand Palais se dresse, de l’autre côté de la colonne des Girondins, le Palais des Colonies où sont groupés les industries et les produits de nos colonies, notamment d’Afrique Occidentale et de Tunisie, ainsi que le commerce d’importation et d’exportation. Par ailleurs, de nombreux  palais, pavillons et stands divers se dressent un peu partout autour des deux palais principaux.
   La manifestation de Bordeaux, officiellement Exposition Maritime, dépasse très largement le cadre que laissait prévoir son titre. Il s'agit également d'une exposition universelle qui rappelle celles du  siècle précédent, et préfigure les foires modernes. Du côté des allées de Chartres, on rencontre le Palais des Vins de Bordeaux et de la Gironde, le pavillon des Eaux-de-vie des Charentes et de Cognac; quatre galeries qui constituent le palais de l'Alimentation; le pavillon des Vins mousseux et enfin le palais des Arts graphiques et celui de l'outillage agricole et viticole.
     Du côté des allées d'Orléans, on remarque quelques autres grands palais, tels que celui de l'Automobile où les grandes marques françaises de l’époque avaient tenu à figurer. Non loin de ce palais est celui de l'Horticulture, puis celui des Industries diverses et le Salon parisien.
    Enfin, sur le bord de la Garonne, de l'autre côté des quais, dans une autre enceinte, à laquelle on accède par une passerelle jetée par dessus la voie publique, se dressent des pavillons étrangers.
 
    C'est d'abord pour la Belgique, la reproduction d'une scrupuleuse exactitude, du merveilleux palais du Steen à Anvers. A son côté, le gouvernement américain a bâti une reproduction réduite d’une partie de l'habitation du président des États-Unis, la Maison-Blanche, qui tranche nettement par sa clarté sur le grisâtre palais de la Belgique. Plus loin, les pavillons de la Russie et de la Grèce élèvent leurs élégantes constructions. Ces nombreux pavillons étrangers qui parsèment l'Exposition Maritime Internationale témoignent bien que le monde entier prend part à la vie de cette œuvre que la Ligue Maritime Française, sous la présidence de M. l'amiral Gervais et avec le concours actif de M. Emile Bertin, a érigée à Bordeaux avec l’aide de la Société Philomathique locale.
 
    En outre, la Direction de l'Exposition a pensé que cette grande manifestation devait aussi comporter des « attractions»  établies à demeure et dont tout visiteur pouvait jouir à toute heure. Citons d’abord le village africain qui est visité constamment car certains jours, c'est par centaines que l'on compte les entrées. C'est qu'il y a vraiment de l'intérêt à cette visite. On y voit là un personnel de quatre-vingts à quatre-vingt-dix personnes, hommes, femmes et enfants, appartenant à quatre ethnies de l'Afrique du Nord, de Soudanais, des Sud-Oranais, des Chambâas et des Ouled-Naïl, formant ensemble un village typique. On remarque également le Royal Palace Cinématographe où chaque jour, le programme comprend de merveilleux ta­bleaux vivants et les plus belles nouveautés cinématographiques en couleurs. Non loin, l'Aéro­plane, fait courir tout Bordeaux  car par un merveilleux système, cet appareil fait parcourir plus de 50 kilomètres à l'heure dans les airs.
    Enfin, ce qui vient ajouter un lustre complémentaire à l'Exposition et surtout à notre port de constructions navales, c'est le lancement du cuirassé d’escadre Vérité, entièrement construit dans les chantiers de la Gironde à Bordeaux. M. Thomson, ministre de la Marine, a présidé le 28 mai 1907 cette solennité, à laquelle cent mille personnes assistaient, et les Bordelais peuvent être fiers que leur ville ait doté notre marine de guerre d'une de ses plus belles unités.
    Pendant le printemps, l’été et l’automne 1907, vont se succéder à Bordeaux, visites royales, princières, ministérielles, personnalités diverses, avec en plus, la venue d’escadre étrangères et de nombreux navires de guerre (France, Japon, Etats-Unis, Angleterre, Russie, Suède, Hollande, Espagne, Argentine,  etc.)
 
    Durant toute la durée de l’Exposition Maritime, Bordeaux, parmi les grandes villes d’Europe, a été choisie pour être durant six mois le lieu de réunion de nombreux Congrès internationaux et nationaux. Plus de cinquante ont en effet, tenu leurs assises dans notre ville. Tous les syndicats, toutes les sociétés, toutes les branches des connaissances avaient tenu à rendre hommage à cette belle manifestation d'art et d'effort industriel que fut l'Exposition Maritime Internationale. A Bordeaux, en effet, durant ces six mois, au sein des innombrables assemblées de congressistes, on a discuté les questions essentielles à l'humanité, on a agité les grandes idées qui la dirigent. On peut dire, sans exagération,  que Bordeaux, par la tenue de ces Congrès, a été un des facteurs du progrès durant cette année 1907 qui entrera dans l'histoire.
   Aussi sans doute est-il donc important, de rappeler aux bordelaises et aux bordelais que déjà en ce début du 20ème siècle, leur ville et leur port qui à cette période connaissait encore d’intenses activités, pouvait rivaliser avec les grandes métropoles nationales et internationales. Pour conserver le souvenir de cette attachante page d’histoire de la ville, un cédérom a été réalisé par l’auteur de cet article. Cet ouvrage numérique, équivalent de plusieurs volumes papier, comporte des centaines de documents iconographiques et constitue une véritable visite virtuelle de ce que fut l’Exposition Maritime Internationale. Le consultant peut à son gré et durant plusieurs heures, se rendre dans les divers palais, pavillons et stands afin de visualiser et approfondir les divers sujets offerts à la curiosité du public en 1907.
Bordeaux Maritime
L'histoire maritime de Bordeaux dans un musée virtuel
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